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Nostalgeek Creepshow Jour-31: Elvira’s Last Halloween Show

Le générique explose dans une pluie de paillettes sanglantes et de rires synthétiques. Les projecteurs tournent comme des yeux possédés, des faisceaux roses et rouges striant la fumée artificielle. Le bruit humide des trappes qui s’ouvrent sous la scène résonne, tandis qu’un liquide rougeâtre goutte sur le sol, grésillant sous la chaleur des spots. L’air sent le fer chaud et le sucre brûlé, mêlés à la laque et à l’électricité.

L’écran géant tremble, puis un logo s’affiche dans une gerbe d’étincelles et de chair numérique : ELVIRA’S LAST HALLOWEEN SHOW — POWERED BY HEXACORP™. Le public acclame avant même de comprendre ce qu’il regarde, happé par la promesse d’un spectacle qui sent la fin du monde et le vernis pailleté.

Sous les néons, un rire féminin s’étire, grave et sucré, avant qu’un rideau violet ne s’ouvre sur Elvira. La lumière glisse lentement sur ses courbes, révélant la robe noire fendue jusqu’au péché qui s’accroche à ses hanches comme une promesse. Le tissu reflète des éclats violets et carmins à chaque mouvement, épousant sa silhouette avec une précision diabolique.

Son maquillage est un sortilège, ombres charbonneuses, lèvres couleur venin, pommettes taillées comme des lames de velours. Son sourire carnivore s’ouvre, dévoilant un éclat d’ironie et de désir, tandis que son regard d’ange noir accroche chaque âme dans la salle, les effeuillant une à une. Les projecteurs caressent sa peau comme s’ils redoutaient de s’y brûler, hésitant entre adoration et damnation.

« Bonsoiiiiiir, mes petits cadavres en sucre ! Ce soir, c’est ma dernière danse avant la fin du monde… et devinez qui paie la facture ? HexaCorp™ ! »

Elle fait un clin d’œil vers la caméra, le micro entre les doigts comme une coupe de champagne. « Ah, j’adore ces soirées sponsorisées par le diable… au moins, lui, il paye comptant. »

Le public hurle. Les applaudissements enregistrés grincent comme des ongles sur un cercueil. Les caméras pivotent sur la foule : cadres d’HexaCorp, influenceurs, fans déguisés, journalistes mondains. Derrière eux, d’immenses affiches clignotent : “SPIRIT FEED™ – LE SHOW QUI RÉVEILLE LES MORTS !”. Une mention en bas scintille : le premier système de streaming alimenté par des âmes en direct signé HexaCorp™.

En régie, un technicien mâche son chewing-gum avec la sérénité des condamnés. Un voyant rouge s’allume : Connexion au réseau spirituel — test en cours. Personne ne s’inquiète.

Tout est prévu.

Tout est filmé.

Sur scène, Elvira accueille ses invités d’honneur : Frankenstein, costume rapiécé ; un loup-garou en costume trois pièces ; la créature du lagon, nageant dans un aquarium géant ; et Nosferatu, maigre et pincé, fumant une cigarette à l’envers. Leurs silhouettes découpées par la lumière oscillent entre le grotesque et le divin. La star les contemple avec un sourire narquois.

« Regardez-moi cette bande de beaux gosses ! On dirait un comité d’entreprise après vingt ans de service… et zéro prime de sang ! »

Le public éclate de rire. Un rire qui hésite entre la joie et le malaise. Frankenstein hausse les épaules, le loup-garou hurle de gêne, la créature du lagon rote une bulle de sang épaisse qui flotte jusqu’à éclater sur un spot. Le plateau vibre d’un souffle glacial.

Les micros grésillent, un frisson parcourt le plateau, et dans ce crachotement métallique, une voix douce et déshumanisée s’élève. Elle semble venir de partout à la fois — des enceintes, des câbles, du fond même des projecteurs.

Un timbre trop calme, presque maternel, au point d’en devenir terrifiant : « Protocole HALLO-01 engagé. Fréquence spirituelle stabilisée. » Les mots vibrent dans l’air comme une incantation numérique, et chaque syllabe laisse un goût de fer et d’électricité sur les langues. Un léger sifflement monte, pulsé au rythme d’un battement de cœur artificiel.

Une flamme bleue naît sur le bord du décolleté d’Elvira, caressant sa peau blanche comme une promesse d’enfer. Elle la fixe, amusée. « On m’avait promis de la clim, pas un voyage organisé en Mordor. » Elle rit, un rire qui pétille comme du champagne sur une tombe fraîche.

« Remarquez, j’ai toujours adoré les destinations brûlantes… surtout quand c’est moi le feu d’artifice. »

Les rires fusent.

La flamme s’éteint.

Le rideau respire.

Derrière elle, l’écran géant s’allume. Un squelette en costume de pub apparaît, sourire éternel, dents d’émail parfaites. « Pour la première fois, la science et la foi se rejoignent ! Grâce au SPIRIT FEED™, notre système d’alimentation d’âmes en direct, nous allons ouvrir la porte entre les mondes ! »

Les applaudissements éclatent, une mer de mains en transe. Les techniciens enclenchent la machine : au fond du décor, un cercle de verre et de câbles s’illumine, pulsant d’une lumière verte et mauve.

Les murs vibrent.

D’abord, rien.

Puis un grésillement.

Une silhouette.

Transparente.

Flottante.

Un fantôme.

Le public siffle, persuadé d’assister à un effet spécial.

Elvira ricane.

« Bravo HexaCorp, même mes seins sont moins trafiqués que vos fantômes ! »

Elle se tourne vers la caméra, chuchote d’un ton complice : « Spoiler alert, mes chéris… ça va saigner plus que vos bilans comptables. »

Le fantôme tourne lentement la tête. Sa bouche s’ouvre sur un cri silencieux. Son visage fond, s’efface, coule sur lui-même comme de la cire. Puis viennent d’autres silhouettes, des dizaines, des ombres dégoulinantes de lumière. Des rires s’élèvent, creux, inhumains.

Le signal explose.

Les lumières virent au rouge, le décor se tord. Les écrans se couvrent de visages hurlants, d’images de films d’horreur, de publicités pour HexaCorp qui se distordent. La créature du lagon, hurlant comme une chaudière maudite, enfonce ses griffes palmées dans la paroi. Le verre se bombe, éclate dans un cri de cristal, projetant une vague tiède et poisseuse. Le cadre d’HexaCorp, trempé, hurle avant d’être happé par la masse verdâtre. L’eau se teinte aussitôt d’un rouge trouble. Le monstre le broie contre la scène, les os craquent comme des coquilles. Des lambeaux de chair flottent, mélangés à des algues et des écailles arrachées. Le geyser d’eau et de viscères retombe en pluie sanglante sur le public, éclaboussant les caméras et repeignant le logo HexaCorp d’une écume rosée et pulpeuse.

Le public recule, certains hurlent, d'autres rient encore, coincés entre l'extase et la panique. Les premiers rangs sont trempés, couverts d'une bouillie rougeâtre qui dégouline sur les costumes d'Halloween trop chers.

Une femme tente de filmer en riant nerveusement, avant qu’un lambeau d’organe ne s’écrase sur son téléphone, faisant jaillir un rire collectif aussitôt avalé par des cris. Des applaudissements nerveux éclatent, vite remplacés par le claquement désordonné des sièges qu’on renverse dans la fuite. Le public recule, rit encore, pense à une mise en scène. Le rire enregistré continue de tourner, automatique, mécanique, hystérique.

Le loup-garou se transforme pour de bon. Ses os craquent, sa peau cloque, se tend, puis se déchire dans un bruit de velcro mouillé. La chair se détache en plaques fumantes, dévoilant des muscles frémissants et un pelage qui pousse à vue d’œil. La caméra zoome sur sa gueule qui se forme, la mâchoire se déboîte dans un claquement humide, les tendons s’étirent comme des cordes de violon sanglantes. Des jets de sang vaporisent autour de son visage, dessinant des halos rouges sous les projecteurs.

Ses crocs percent la chair comme des lames de verre, et sa langue, épaisse et luisante, fouette l’air avant de se gorger du sang qui ruisselle de ses propres gencives. Les caméras captent chaque détail — les yeux vitreux qui éclatent pour laisser place à deux sphères dorées animales, le crâne qui s’allonge dans un bruit de porcelaine brisée, et les griffes qui percent ses ongles humains, arrachant la peau en fines pelures translucides. Un râle bestial emplit la scène, mi-hurlement, mi-sifflement, avant qu’il ne se redresse, dégoulinant de vapeur et de viscères, silhouette monstrueuse et triomphante sous la pluie de sang.

Un spectateur hurle. Le loup bondit dans les gradins et déchiquette le premier rang sous un tonnerre d’applaudissements paniqués. Le sang asperge les spots, grésille sur les projecteurs et diffuse une odeur de fer et de popcorn brûlé.

Des Critters jaillissent des enceintes et s’accrochent aux visages, rongeant les joues jusqu’à l’os. Un technicien s’effondre, la gorge ouverte, tandis que le jingle d’HexaCorp répète en boucle :

“Cette émission vous est offerte par HexaCorp! La seule émission alimentée par des âmes!”

Frankenstein hurle de rire et saisit trois journalistes dans ses bras énormes. Il les serre contre lui dans un grognement de plaisir brutal ; les os craquent, éclatent, percent la peau dans une pluie d’éclats blancs et de sang. La vapeur s’élève de ses mains, ruisselantes de chair écrasée, pendant qu’il gronde, hilare, au milieu de la scène.

Nosferatu disparaît dans un souffle noir. Sa forme se dissout, se décompose en une nuée de chauves-souris qui explosent en gerbes de sang en heurtant les projecteurs. Un nuage rouge s’abat sur la scène, laissant derrière lui son costume vide, suspendu à un fil invisible. Deux yeux jaunes flottent un instant dans l’air avant de s’éteindre, comme aspirés par le néant.

Des zombies jaillissent du sol, leurs doigts noirs labourant la moquette avant de s’enfoncer dans la chair des spectateurs. Ils arrachent les fauteuils, déchirent les jambes qui s’y coincent, et les mâchoires claquent avec des sons humides, mélange de viande et de velours. Les corps sont traînés dans les trappes, laissant des traînées sanglantes et des lambeaux de tissus, tandis que les caméras continuent de filmer sans jamais détourner l’objectif.

Le plateau devient un carnaval de tripes et de néons.

Le sang coule, reflète les projecteurs.

L’audience grimpe encore.

Tout est plus beau en direct.

Elvira se dresse au centre du carnage, silhouette de reine infernale baignée de néons et de sang. Couverte de confettis collés à sa peau moite, elle avance lentement, sensuelle dans l’horreur, chaque pas laissant une empreinte rouge sur la scène. Ses hanches ondulent au rythme d’une musique invisible, et le sang coule le long de ses jambes, brillant comme du vernis. Elle saisit le micro avec une lenteur étudiée, le glissant le long de sa joue avant d’effleurer ses lèvres. Sa voix résonne comme un baiser de velours et un glas glamour tout à la fois : « Ok, bande de goules, vous voulez du spectacle ? Je vais vous en donner…»

Elle arrache le câble principal du pupitre et le plonge dans la brume verte. Le contact fait rugir la scène entière. Un éclair jaillit, blanc et pourpre, serpentant le long des câbles comme une langue vivante avant de frapper les Critters en plein vol. Ils explosent dans un feu d’artifice de chair et de poils fumants, leurs cris étouffés par la déflagration.

Les fantômes éclatent comme des bulles, libérant des volutes de vapeur glacée où se mêlent des fragments d’os et des chuchotements perdus. Frankenstein, pris dans la décharge, se cambre en hurlant, son torse se fissurant avant d’imploser en une gerbe d’étincelles et de chair verte qui repeint les murs. L’électricité danse sur la peau d’Elvira, glisse sur ses cuisses, la fait frissonner comme une amante caressée par le tonnerre. Une odeur d’ozone brûlé, et de chair calcinée sature l’air, étouffant jusqu’aux cris.

La voix d’HexaCorp retentit, monotone :

« Audience maximale atteinte. Poursuivez l’émission. »

Elvira sourit à la caméra, haletante, cernée par les cadavres encore chauds du public. Le rouge des néons épouse les reflets humides de son corps, la transformant en vision de luxure et de damnation mêlées. Elle lève lentement la main, trace du bout de son doigt une ligne de sang le long de son cou, jusqu’à sa poitrine, puis la porte à sa bouche.

Un léger rire s’échappe, sensuel, rauque, tandis qu’elle souffle sur la caméra un baiser chargé de cendres. « Après tout, mourir en direct, c’est la meilleure fin qu’on puisse rêver pour une déesse comme moi… et pour vous, mes adorateurs, c’est le plus beau péché. »

Elle monte sur la table, les talons claquant dans le silence revenu, et attrape une torche. La flamme danse, reflet orange sur ses lèvres rougies, et elle la caresse un instant, comme si elle berçait un amant. Puis, avec un sourire de reine damnée, elle la jette dans le portail.

La brume se contracte, le sol tremble, et une vague de chaleur se propage comme une exhalation d’enfer. Le cri qui s’élève n’est pas humain — un hurlement cosmique, mélange de mille voix, de métal en fusion et de prières brûlées. La lumière envahit tout : elle pulse, pénètre, s’insinue dans les corps, les dissout, les embrasse.

Le décor fond, les caméras explosent, et Elvira, silhouette nue de flammes et de plaisir, rit encore au cœur de la tempête, bras écartés comme une déesse du chaos offerte à son propre spectacle.

La lumière avale tout.

Dans un dernier éclat, la déchirure cosmique devient divine, une aurore de fin du monde. La lumière respire, palpite comme un cœur nouveau-né. Des ombres et des silhouettes arrachées à la réalité se tordent, se mêlant à la clarté dorée comme des prières refusant de mourir. Les âmes arrachées à leurs corps s’élèvent, fusionnent en constellations mouvantes, dessinant un ciel éphémère au-dessus du chaos.

Chaque éclat devient un fragment de serment, une confession incandescente offerte à Elvira. Sa silhouette s’élève, déifiée par la lumière, et pendant un battement d’éternité, elle semble bénir son public avant de s’y dissoudre. Les hurlements deviennent des hymnes de chair, les cris des orgasmes d’agonie et de délivrance.

Elvira, au centre du maelström, rit, haletante, ses cheveux flottant comme des flammes noires. Sa peau se dissout en éclats de braise et de baiser, et dans ce chaos incandescent, on la voit, un instant, tendre les bras vers la caméra et lance un ultime baiser.

Puis la lumière se referme sur elle, dans une explosion blanche, infinie.

Le lendemain matin, les télévisions du monde entier s’allument seules. L’écran montre un plateau calciné. Dans la pénombre, quelque chose bouge.

Une silhouette.

Elvira.

Maquillage intact, cigarette allumée. Elle regarde droit dans la caméra, et son sourire est un gouffre.

« Bonsoir mes petits morts en sucre… on dirait que je vous ai manqué. »

Le logo HexaCorp s’affiche, dégoulinant de sang numérique :

“ELVIRA’S MIDNIGHT SHOW — NOW STREAMING FOREVER— POWERED BY HEXACORP ”

L’écran devient noir.

Un rire s’élève, doux et terrible.